En 1820, la France occupe la première place dans le classement des pays les plus peuplés d’Europe, mais passe à la quatrième place en 1968 après avoir connu une croissance démographique moindre que la plupart des pays d’Europe. Au début des années 2000, la France remonte à la seconde place, qu’elle occupe toujours en 2020, avec une croissance reposant quasi exclusivement sur sa fécondité, qui est actuellement la plus élevée d’Europe.
La population européenne connaît un vieillissement significatif (20,1 % de la population est âgée de 65 ans ou plus en 2019 contre 17,5 % en 2010) mais tous les pays ne sont pas concernés de la même façon. Dans les pays du Nord, le phénomène a débuté dans les années 1980. Les pays du Sud, comptant aujourd’hui les plus fortes proportions de personnes âgées d’Europe, n’ont été que plus tardivement concernés, le rapport entre leur population âgée de 65 ans ou plus et celle des moins de 20 ans (indice de vieillissement) doublant entre 1991 et 2019. C’est enfin dans les pays d’Europe centrale et orientale que le vieillissement a été le plus rapide ces dix dernières années, phénomène accentué par un déficit migratoire quasi général.
La France se situe quant à elle dans la moyenne européenne avec 20,0 % de personnes âgées de 65 ans ou plus en 2019. Par ailleurs, avec une personne sur quatre âgée de moins de 20 ans, la France figure aujourd’hui parmi les pays les plus jeunes d’Europe, son indice de vieillissement étant particulièrement faible. Elle fait partie des pays contribuant le plus à la croissance démographique du continent, derrière le Royaume-Uni, l’Allemagne et l’Espagne.
Les dynamiques naturelles portent la croissance démographique de la majorité des départements français jusqu’au milieu du XIXe siècle. La mécanisation du secteur agricole et l’industrialisation contribuent largement au processus d’urbanisation, qui se traduit notamment par une hausse de la population urbaine. Certains départements bénéficient davantage de ces dynamiques et voient leur attractivité se renforcer : entre 1851 et 1911, seulement dix départements concentrent un peu plus de 80 % de la croissance démographique. Au sortir de la Première Guerre mondiale, les villes poursuivent leur croissance et la population française devient majoritairement urbaine au cours de l’entre-deux-guerres. La période des Trente Glorieuses (1945-1975) marque le dernier mouvement d’exode rural généralisé en France et il n’a fallu que 30 ans pour passer d’un peu plus de 50 % de population urbaine à 70 % en 1968.
La fin des années 1960 marque une rupture dans la géographie de la croissance démographique, avec un mouvement de périurbanisation massif de la population. Des ménages de plus en plus nombreux s’installent en périphérie des villes, cherchant notamment à accéder à la propriété et à un habitat individuel. En 2018, près de deux Français sur trois vivent dans une aire d’attraction urbaine de 200 000 habitants ou plus ; ces espaces concentrent même 95 % de la croissance de population entre 2013 et 2018, contre 75 % cinq ans plus tôt. Les couronnes de ces pôles sont encore aujourd’hui les principales bénéficiaires de cette dynamique et ce, d’autant plus que la taille de l’aire d’attraction à laquelle elles appartiennent est importante. Néanmoins, le phénomène de vieillissement pourrait venir perturber le dynamisme démographique de ces espaces dans les prochaines années, particulièrement dans les régions septentrionales où le solde migratoire est le plus souvent déficitaire. De la même façon, les périphéries des pôles ont vu s’installer, au gré des différents mouvements de périurbanisation, de jeunes familles avec enfant(s). Aujourd’hui, ces familles ont vieilli dans ces territoires, cette évolution se traduisant par une augmentation particulièrement rapide du nombre de personnes âgées dans les espaces périurbains.
Tout au long du XXe siècle, la part de population âgée n’a cessé d’augmenter en France en raison d’un double phénomène de baisse de la mortalité et d’allongement de l’espérance de vie (vieillissement par le haut) et de baisse de la natalité (vieillissement par le bas). En parallèle et depuis la fin du baby-boom d’après-guerre, comme sur l’ensemble du continent européen, la part de population âgée de 15 à 29 ans n’a cessé de diminuer au cours des dernières décennies, pour représenter, en 2018, moins d’un Français sur cinq. La démocratisation de l’accès aux études supérieures et la diversité des offres d’emplois dans les grands pôles urbains favorisent une concentration croissante des jeunes dans ces espaces (20 % des 15-29 ans se concentrent dans 30 communes en 2018, contre 46 en 1982). Les territoires de la diagonale centrale (de la frontière belge au sud-ouest aquitain) et, plus globalement, les territoires les moins denses, connaissent un vieillissement particulièrement important, du fait des nombreux départs des populations les plus jeunes. En revanche, une partie de ces espaces se montrent attractifs pour la population âgée de 65 ans ou plus, entraînant des déséquilibres d’âge importants.
À l’inverse, l’arc reliant la façade atlantique à la vallée du Rhône en passant par le littoral méditerranéen se caractérise par une forte concentration de populations jeunes dans les pôles et particulièrement de jeunes actifs dans les zones frontalières. Toujours sur cet arc, les littoraux se montrent surtout attractifs pour les retraités. À Paris et dans une grande partie de l’Île-de-France, le vieillissement est quant à lui plutôt modéré ; ces territoires se distinguant davantage par leur attractivité pour les jeunes actifs, les départs de familles avec enfant(s) et de retraités étant nombreux depuis cinquante ans.
Entre 2013 et 2018, la diminution du nombre d’intercommunalités portées par une croissance à la fois naturelle et migratoire affecte l’ensemble des régions. Certaines d’entre elles sont par ailleurs pour la première fois en déprise démographique (Bourgogne-Franche-Comté, Normandie, Grand-Est ou encore Guadeloupe), du fait d’un excédent naturel qui ne suffit plus à combler leur déficit migratoire.
Les départements en déprise démographique n’ont jamais, depuis la dernière guerre, été aussi nombreux qu’aujourd’hui, soit un tiers d’entre eux. L’espace couvert par les territoires nouvellement en déprise s’étend à l’est du Bassin parisien mais surtout vers le nord (une grande partie de la Somme et la quasi-intégralité de l’Aisne) et vers le nord-ouest, aux confins des Pays-de-Loire, du Centre-Val de Loire et de la Normandie.
En 2018, l’Observatoire des territoires relevait que les différences de trajectoires démographiques étaient plus marquées de part et d’autre d’une ligne Saint-Malo – Genève qu’entre territoires urbains et ruraux1. Selon les dernières projections départementales de l’Insee à l’horizon 2050, la population du Sud-Ouest continuerait de croître malgré un vieillissement accentué, et ce sont les espaces situés autour d’un arc atlantique, méditerranéen et rhodanien en forte croissance qui continueraient d’enregistrer les augmentations de population les plus importantes. À l’inverse, l’Île-de-France et les territoires de l’ancienne région Nord-Pas-de-Calais conserveraient une dynamique démographique portée uniquement par un solde naturel, qui compenserait leur déficit migratoire. Les métropoles et leurs périphéries, les Pays de la Loire, la Normandie, de même que l’ancienne région Alsace et les départements longeant la vallée du Rhône pourraient être les derniers ensembles régionaux à combiner des soldes naturel et migratoire apparent positifs. En Martinique, le vieillissement de la population accentuerait la déprise démographique, poursuivant ainsi une phase de décroissance déjà entamée aujourd’hui, et liée essentiellement à un déficit migratoire.